Mon nom est Holmes. Jodie Holmes.

Il était une fois une jeune femme nommée Jodie Holmes. Elle était dotée de pouvoirs psychiques incroyables, qui lui permettaient de se connecter à une entité surnaturelle dénommée Aiden. Et… On n’en dira pas plus ici, pour éviter tout divulgâchage ! Beyond: Two Souls, c’est l’un des fers de lance de Quantic Dream ; une production étalée sur trois and et demi, qui a impliqué près de 140 personnes. Annoncé à l’E3 2012, ce jeu initialement exclusif à l’univers PlayStation a été récemment porté sur PC par nos équipes (il est même dispo ici en version physique ). Il met en avant plusieurs grands noms du cinéma, avec en tête d’affiche Elliot Page, qui incarne Jodie. Au cours du jeu, de nombreux embranchements offrent la possibilité aux joueurs d’influer sur le destin de notre héroïne ; et figurez-vous que de cette signature narrative typique des productions de notre studio, nous avons pu dresser son portrait-type. Mais avant de rentrer dans les détails, prenons un instant pour retracer l’origin story de notre héroïne avec David Cage, qui lui a donné forme au creux de son imaginaire.   

David, tu as écrit et réalisé Beyond: Two Souls ; quand et comment t’es venue l’idée du personnage de Jodie Holmes ? 

C’est une longue histoire… Ma mère vit des expériences paranormales depuis toujours, elle a des prémonitions et elle croit profondément qu’il existe tout un univers invisible d’esprits autour de nous. C’est quelque chose qui m’a marqué depuis mon enfance, et j’avais en tête de créer une histoire autour de cette idée depuis longtemps. Ce qui m’intéressait, c’était de donner une explication scientifique à cette mythologie, de la traiter comme une réalité physique. J’étais aussi fasciné par ces expériences faites par les services secrets russes et américains dans les années 50 pour déterminer si les voyants et extralucides pouvaient être utilisés à des fins militaires. En 1939, c’est Messing, le voyant de Staline, qui prédit la victoire contre l’Allemagne nazi et la date de la capitulation allemande. Dans les années 70 aux Etats-Unis, c’est le projet « Stargate » qui réunit un petit groupe de voyants au sein de la CIA pour tenter de prédire des évènements à distance, groupe qui sera en activité pendant plus de 20 ans. 

Après une grosse phase de recherches dans le paranormal, le domaine militaire, mais aussi la physique quantique, j’ai imaginé le personnage de Jodie Holmes, une petite fille qui vit entre les deux mondes depuis le jour de sa naissance. J’ai voulu raconter comment elle allait vivre avec sa différence aux différents âges de sa vie et apprendre à s’accepter. Ce que j’ai trouvé fascinant, c’est la manière dont cette approche permettait finalement de tout expliquer rationnellement. Dans l’Antiquité, les hommes pensaient que la pluie et le tonnerre venaient des dieux, avant qu’on ne découvre une explication physique à ces phénomènes. L’idée que la mort et les phénomènes paranormaux puissent relever de la même logique m’a réellement passionné. 

Jodie a un lien avec un esprit qui vit « de l’autre côté », qui est à la fois une partie d’elle-même et une sorte de fardeau qui l’empêche de mener une vie normale. Cette idée de quelqu’un qui souffre d’être celle qu’elle est, était vraiment passionnante pour moi. Plutôt que de traiter ça comme une sorte de « super-pouvoir », j’ai préféré en faire un poids. Jodie aurait préféré être « comme tout le monde », mais elle doit accepter qu’elle est celle qu’elle est, ce qui est une thématique universelle. Plutôt qu’une histoire sur l’au-delà, Beyond est une histoire sur le fait de s’accepter tel qu’on est.  

Beyond:Two Souls laisse aux joueurs la possibilité de choisir certains comportements de Jodie. De ton côté, quelle était la personnalité que tu avais en tête pour elle ?  

Je voulais à la fois créer un personnage avec une personnalité marquée, et laisser le joueur contribuer à la caractérisation pour décider comment Jodie allait réagir à différents moments importants de sa vie. L’idée, comme dans tous les jeux de Quantic Dream, était de raconter une histoire non pas « pour » le joueur, mais « avec » le joueur, et de construire ce personnage ensemble. Cela commence dans les scènes de l’enfance ou de l’adolescence où le joueur doit décider comment Jodie va réagir aux mauvais traitements qu’elle subit de la part d’autres ados, jusqu’à l’âge adulte où elle va être confrontée à un choix décisif qui va donner un sens à toute sa vie. 

Jodie est quelqu’un de sensible et courageux, quelqu’un qui ne peut pas vivre avec sa moitié invisible… mais qui ne peut pas vivre sans non plus. C’est quelqu’un entre deux mondes, quelqu’un qui lutte pour s’accepter et trouver sa place, et devenir celle qu’elle est. Elle a été un personnage absolument passionnant à écrire pour toutes ces raisons. 

Quel regard portes-tu sur elle aujourd’hui ?  

J’ai vraiment adoré travailler sur ce projet, de l’écriture à la collaboration avec Elliot Page et Willem Dafoe. Ils ont tous les deux délivré des performances exceptionnelles et énormément apporté aux personnages. J’ai aussi été frappé par la manière dont de nombreux joueuses et joueurs ont été marqués par leur expérience et les thèmes développés dans le jeu. Beyond est une expérience très particulière, très différente des histoires classiques de jeux vidéo par les thèmes qu’elle aborde et l’émotion que Elliot a apporté au personnage. C’est un jeu dont je suis particulièrement fier et qui a été pour moi un vrai tournant dans ma manière d’écrire et de réaliser.  

Merci David ! Maintenant que vous avons l’origin story de Jodie Holmes en tête, revenons-en à notre fameux portrait-robot. Parce qu’il y a bien sûr le portrait que chaque personne établit au cours de son expérience sur Beyond: Two Souls, avec ses propres choix, mais il y a aussi celui qui se dessine en additionnant l’ensemble des parties jouées à travers le monde ! 
Regardons ça de plus près : 

En partant de ces résultats mondiaux, on peut commencer par affirmer que globalement Jodie n’est pas très gourmande, puisque près de 90% des joueuses et joueurs ont choisi de ne pas lui faire manger de cookie, même si presque 8 fois sur 10, elle ne refuse pas de se lancer dans la préparation d’un bon petit plat salé ! Elle est d’autre part assez portée sur son look : 7 fois sur 10, elle prend le temps de s’habiller élégamment. Inversement, elle paraît moins branchée chaussures puisqu’à plus de 80%, elle est passée à côté de la boîte à chaussures, sans s’y attarder.  

On le voit, Jodie est une artiste inspirée : quand elle peut dessiner, elle n’hésite pas une seconde ! Il paraît à ce propos que les artistes s’épanouissent souvent dans le chaos, mais elle, à priori non : 80% du temps, elle est partante pour se lancer dans un grand ménage de printemps. Une personnalité cultivée et ordonnée qui se profile ? En toute logique, elle opte pour la politesse, plus de 70% des fois où elle a eu le choix de le faire. En revanche, elle ne manque pas de garder tout de même une attitude impertinente de temps à autre, en choisissant par exemple de réveiller 9 fois sur 10 Cole. Pas Cole cool. Polie et disciplinée donc, mais un peu taquine ! Ce petit côté rebelle se reflète dans ses déplacements : elle privilégie la moto quand c’est possible, même si elle est peut aussi se motiver pour une balade en forêt. Elle sait quand même s’imposer des limites, en évitant par exemple d’espionner des personnes de son entourage proche, ou des inconnus dans un bar. Born to be wild, mais dans le respect. 

En résumé, Jodie version globale est bien éduquée, avec une forte sensibilité artistique, un côté foodista et fashionista, bec salé plutôt que sucré, qui peut avoir tendance à adopter une attitude un peu rebelle, mais avec ce qu’il faut de retenue. Elle privilégie par ailleurs la moto pour se déplacer, devant la marche. Quand on y pense, ça se tient, puisqu’elle n’est pas spécialement branchée chaussures. Oh, et sinon, elle peut se montrer parfois romantique, mais pas trop. On ne vous en dit pas plus : pour avoir les détails, il faudra (re)commencer l’aventure !