QD REACTS – DETROIT: BECOME HUMAN 3RD ANNIVERSARY

Vendredi 25 mai 2018 : la sortie mondiale de Detroit: Become Human marque la fin de 5 années de travail pour nos équipes de développement, qui ont repoussé une fois encore les limites de ce nous pensions alors réalisable, après les grandes étapes Heavy Rain et Beyond: Two Souls. L’histoire mêlée de Kara, Markus, Connor, et tous les androïdes du monde imaginé par Quantic Dream, fait aujourd’hui encore figure de pierre angulaire pour notre studio. Pour ce troisième anniversaire, nous voulions remonter un peu le fil avec quelques témoins-clefs de cette aventure unique.

Tu avais quel rôle sur le développement de Detroit: Become Human ?

Marlène Richier – Producer 

J’ai rejoint Quantic Dream en septembre 2015 en tant que Coordinatrice de Production rattachée au département R&D pour faire le suivi des équipes de développeurs. Rapidement, j’ai également effectué le suivi de l’équipe Personnages Non-Jouables (PNJ), en charge de concevoir et implémenter l’habillage des scènes du jeu qui comportent des personnages non-contrôlés par les joueurs. En 2017, j’ai endossé le rôle de Scene Producer, pour assurer le suivi de certains chapitres du jeu, en collaboration avec toutes les équipes.

Grégorie Diaconu – Associate Game Director  

J’ai débuté le projet en tant que Senior Game Designer. À l’époque, j’ai principalement travaillé à l’élaboration des piliers du gameplay et du scénario du jeu. En cours de projet j’ai évolué vers le poste d’Associate Game Director, où j’ai eu le plaisir d’assurer avec David Cage la direction créative du projet. Un rêve de gamin, je ne vais pas vous mentir ! 

Sébastien André – Lead Set  

J’étais Lead Environnement, je dirigeais l’équipe qui avait la charge de créer tous les décors et éléments de décors pour le jeu.  

Benjamin Diebling – Shooting Director 

Après Beyond: Two Souls, j’étais parti étudier l’écriture en Australie ; le premier jour de mon retour à Quantic Dream, le producteur shooting m’a dit : « Tu te rappelles Kara ? On en fait un jeu. Voici la première scène à préparer pour qu’on la tourne ». Je me suis retrouvé à mon bureau avec une scène à lire dans les mains : 

« Detroit: Become Human  
01C: THE HOSTAGE » 

J’ai donc commencé au poste de premier assistant réalisateur et responsable casting, et après quelques mois je suis passé réalisateur ; c’était une chance incroyable car j’étais plutôt jeune (27 ans), David Cage m’a donné ma chance sur un tournage – la scène lorsque les manifestants bousculent Markus dans Shades of Color – et ce fut le début de grands souvenirs. ?

C’était quoi les plus grands challenges que tu as eu à relever au cours du développement ? 

Marlène : Clairement ça a été la mise en place et l’implémentation de la fin du jeu, le moment où les personnages commencent à se croiser et que tout s’enchaîne, morceau après morceau. Coordonner tout ça a été un immense défi : il a tout d’abord fallu communiquer et partager la vision créative de ces scènes, puis s’assurer que les enchainements étaient bons en fonction des dizaines, voire des centaines de possibilités, et enfin peaufiner la qualité tout en optimisant les performances.  

Grégory : Autant dans la phase d’écriture du jeu que pendant le développement, un gros défi était de s’assurer qu’il n’y ait pas de « bonne » ou de « mauvaise » version du jeu, mais que chaque joueur ait son histoire, aussi valable que n’importe quelle autre. Je pouvais passer des journées à rejouer chaque scène en testant à chaque fois les chemins les plus improbables, en essayant de repérer n’importe quel détail qui pourrait sortir le joueur de l’expérience. Ou au contraire, identifier ce qui, avec un peu de travail, pourrait créer un moment mémorable ! 

Sébastien : La diversité des environnements ; Detroit c’est plus de 120 environnements et 2700 éléments de décor qu’il a fallu créer, assembler et fignoler tout au long de la production. Toute la difficulté a été de conserver l’esprit de la ville de Détroit, son passé, son histoire forte, mais aussi de lui insuffler suffisamment de modernité pour se projeter en 2038. 

Benjamin : Sans hésiter, le nombre d’animations qu’il y avait à tourner. On a un rythme très soutenu en tournage et malgré cette cadence, ça nous a pris environ 380 jours de tout tourner. C’est très long. Maintenant que c’est fini, on sait que c’est possible, mais quand on est au milieu de la production du jeu, la perspective de tout ce qu’il reste à faire est assez impressionnante, il faut s’accrocher pour rester motive et réussir à transmettre cette motivation à son équipe !

C’est quoi ta scène préférée ?

Marlène : Freedom March, pour laquelle j’ai une affection particulière. J’ai commencé à la suivre alors que j’étais encore rattachée à l’équipe PNJ, et justement, des personnages non-jouables il y en a beaucoup dans cette scène ! Nous avons notamment travaillé sur le système de la foule d’androïdes qui suit Markus, c’était très intéressant et impressionnant de suivre les améliorations qui ont été apportées pour que cette foule semble la plus naturelle possible. 

Grégory : Crossroads est à mon sens un vrai tour de force, de par le tournant émotionnel qu’elle représente pour les trois personnages principaux, la quantité invraisemblable de branches narratives, l’intensité de la séquence d’action, la prouesse technique d’avoir un montage ininterrompu entre les personnages… Sinon, la scène The Bridge où on a deux personnages qui discutent sur un banc. Ça marche aussi. 

Sébastien : J’avoue que Hostage a vraiment été un défi à la fois technique et artistique ; c’était la première fois que nous devions poser un benchmark visuel, pour la présentation à l’E3 de Los Angeles, qui devait mettre tout le monde d’accord ?. Je suis très fier de cette scène, parce qu’elle a marqué le début du développement.  

Benjamin : J’aime beaucoup Partners pour plein de raison : au-delà du fait qu’il y a mes deux personnages préférés et que ça marque le début de leur relation complexe, ça a été mon premier défi aussi en tant que réalisateur pour rendre vivant une scène à travers les PNJ. À l’époque on avait beaucoup travaillé avec les autres départements pour créer une ambiance unique, dans l’esprit du film Se7en ; j’aime beaucoup le résultat. Dans le même esprit j’adore aussi la scène The Nest.

Et ton personnage préféré ? 

Marlène : Sans hésitation, mon personnage préféré est Connor, ou plus exactement la relation qui se crée entre Connor et Hank. C’est l’une des très belles réussites du jeu, et pour avoir pu visionner quelques vidéos des tournages de Performance Capture, cela sautait aux yeux à quel point ce duo fonctionnait à merveille. 

Grégory : Rose apparait finalement assez peu dans le jeu, mais en quelques minutes arrive à être profondément attachante et émouvante, et la performance de Dana Gourrier lui donne une vraie humanité. Je suis fan.  

Sébastien : Si je devais choisir, je pense que mon choix se tournerait vers Kara : elle incarne à la fois la douceur et la détermination. Et puis la relation qu’elle peut développer avec Luther et Alice est vraiment très forte.  

Benjamin : Si c’est parmi les personnages jouables, c’est Connor ! J’adore les thriller et les polars, j’adore aussi les jeux de rôle où l’investigation est au centre, et Connor remplit toutes ces cases. J’ai aussi un vrai coup de cœur pour Hank, peut-être parce que c’est le personnage dont je me sens le plus proche. 

Trois ans plus tard, qu’est-ce que tu retiens de cette aventure ? 

Marlène : Déjà, je n’ai pas l’impression que cela fait déjà trois ans, peut-être parce qu’après sa sortie sur PlayStation 4, j’ai continué à travailler sur la version PC du jeu pendant 2 ans. Mais ce que je réalise aujourd’hui, c’est l’aventure humaine que cela a été pour moi : travailler plusieurs années sur un même projet, avec les mêmes personnes, ça crée un lien très fort.  

Grégory : Que c’est un luxe rare dans cette industrie de faire exactement le jeu qu’on souhaite faire, et ça a été le cas sur Detroit. Derrière chaque moment de l’expérience, il y a eu l’attention et le souci du détail apportés par l’ensemble de l’équipe et je pense que ça se ressent vraiment.  

Sébastien : On a fait l’un des plus beaux jeux de la PlayStation 4, et pour un artiste c’est hyper gratifiant ?. Ça a vraiment été une aventure enrichissante, par le nombre de décors, ses environnement différents d’une scène à une autre, la complexité de l’histoire et de ses embranchements. L’équipe Sets a vraiment été au top ! 

Benjamin : Des rencontres et de l’expérience. Travailler sur Detroit c’est avoir pu rencontrer et travailler avec des gens incroyables et avoir appris à leurs côtés. 

Tu as un petit secret ou un souvenir spécial que tu voudrais partager avec les fans ?  

Marlène : Le jour où on a appelé tous les employés sur le plateau de tournage pour nous faire crier plein de choses : des slogans, des acclamations diverses, etc. Donc si vous trouvez que les cris de foule ont un accent français, vous saurez d’où ça vient ! ? Enfin, j’aimerais inviter les fans à prêter encore plus d’attention à tous les PNJ ; il y a eu énormément de travail là-dessus (je peux en témoigner !), ça raconte beaucoup de choses sur l’univers.  

Grégory : Lors de la présentation du jeu à l’E3, nous faisions des démonstrations, certaines en tête à tête, d’autres devant des foules entières. Chaque démonstration était unique, chaque groupe de joueurs faisait ses propres choix, mais dans tous les cas la réaction était électrique. Il y avait quelque chose de magique à se promener sur le showfloor et entendre au détour d’une conversation les joueurs comparer leurs expériences. Ça fait partie des moments où on a commencé à réaliser que le jeu pouvait être quelque chose de spécial.  

Sébastien : Voir les acteurs en train de jouer les scènes dans notre studio de motion capture est toujours très excitant. On voit tout de suite le potentiel des scènes que l’on va devoir retravailler ensuite, ça donne encore plus envie de sublimer les décors ?  

Benjamin : Le dernier jour de tournage. Tout l’équipe est partie fêter ça, mais je n’ai pas suivi tout de suite, je voulais éteindre les lumières du plateau ; et je suis resté quelques minutes seul dans cette salle, où je venais de vivre une grande aventure humaine et professionnelle. J’ai versé une petite larme de bonheur en repensant à tout ce que j’avais vécu ici, et j’ai rejoint mon équipe le sourire aux lèvres. Cette production m’a vraiment appris que l’on pouvait arriver au bout de choses insurmontables, en y allant étape par étape.